Les grands thèmes de recherche sont amenés à évoluer dans les prochaines années, non seulement par l’approfondissement des recherches dans les aires arabe et iranienne, mais aussi par le développement des études berbères et l’intégration des études arméniennes, l’essentiel des activités se développant dans le cadre de réseaux de recherche nationaux et internationaux déjà mis en place ou appelés à se structurer.
Le pôle « Langues, littérature, linguistique » visera notamment à favoriser l’étude des croisements, transferts et échanges entre les diverses aires linguistiques représentées à l’IREMAM, et au-delà de ce cadre qui, en soi, est sous le signe de la multiplicité des langues et des civilisations.
Responsables du pôle : Malika Assam et Stéphane Cermakian
Chercheur·e·s, enseignant·e·s-chercheur·e·s, émérites, ater : Alessia D'Accardio Berlinguer (ATER), Malika Assam (MCF), Mohammed Bakhouch (émérite), Stéphane Cermakian (MCF), Salem Chaker (émérite), Jairo Guerrero (MCF), Frédéric Imbert (PU), Richard Jacquemond (PU), Pierre Larcher (émérite), Homa Lessan Pechezki (PU), Catherine Miller (émérite), Remo Mugnaoni (MCF), Hakan Özkan (PR), Manuel Sartori (PR)
Chercheur·e·s associé·e·s : Maxime Adel, Claude Audebert, Annamaria Bianco, Abdallah El Mountassir, Jacopo Falchetta, Ammar Kandeel, Saïda Larej, Rosa Pennisi, Catharina Pinon, Sbeih Sbeih, Intissar Sfaxi
Doctorant·e·s : Lahcen Addichane, Laalikhan Ali, Chakib Ararou, Nedjma Atoui, Saïda Belkadi, Fatima Mohti, Fanny Rauwel, May Rostom, Najla Salim, Mehdi Zoghaib
Dans le domaine arabe, les recherches en sociologie de la littérature et des échanges littéraires se poursuivront avec notamment un projet sur les conditions de formation du canon littéraire dans l’espace littéraire arabe contemporain, envisagé comme espace transnational et plurilingue (R. Jacquemond). Dans un premier temps, le travail se concentrera sur l’étude de l’importation des œuvres et auteurs arabes, d'expression arabe mais aussi d'expression anglaise, française, etc., dans les espaces européen et nord-américain depuis les années 1990, ainsi que l'importation, via la traduction interne, des littératures arabes en langues européennes dans l'espace littéraire arabe. Au-delà des flux de traduction, on étudiera les processus de consécration à l’œuvre dans les principaux centres de l’espace littéraire mondial (Amérique du Nord, Royaume-Uni, France, Allemagne) – prix littéraires, réception médiatique, publications académiques, etc. – ainsi que leurs effets en retour sur la position des auteurs dans leurs champs ou sous-champs nationaux respectifs. Par ailleurs, un travail éditorial est en cours sur les Mu‘allaqāt : histoire, structure, traduction (P. Larcher).
Les années à venir verront se développer les études arméniennes, intégrées à l’IREMAM en septembre 2021 (S. Cermakian). Le fait arménien, tel qu’il se manifeste dans la littérature, l’histoire, la langue et la traduction, autant dans les espaces nationaux successifs que dans les diasporas historiques, sera au cœur des recherches en arménologie à l’IREMAM. Une collaboration avec le CIELAM est aussi envisagée. Suite aux journées d’étude de 2023 sur l’exil et la traduction, on cherchera à déterminer la jonction épistémologique entre ces deux notions. Les études sur la poétique de l’exil s’élargiront à d’autres époques, à partir du séminaire
« Anthropologie historique » mais aussi d’un nouveau sous-axe transversal qui abordera les échanges et transferts culturels de l’aire allant de l’Asie mineure à l’Asie centrale, envisageant les sources textuelles des diverses civilisations aussi bien dans le domaine de la littérature que de l’histoire et de l’anthropologie. Enfin, le renouvellement des accords entre AMU et l’Université d’État de Erevan en 2022 permet de prévoir des partenariats transdisciplinaires sur les transferts culturels entre l’Arménie, la France et le Moyen-Orient, et si possible un événement lié au réseau Globalmed fondé à la MMSH et dont Erevan est désormais partenaire.
Des recherches sur la société et le théâtre palestiniens contemporains seront menées à partir du fonds d’archives de François Gaspar et déboucheront sur un essai à propos de ces archives (N. Nakhlé-Cerruti). De façon générale, les travaux conduits dans ce domaine se situeront au croisement des études littéraires arabes et des études théâtrales, et proposeront l’étude de la création et de la production théâtrales en contexte de conflit (Palestine, Irak, Syrie). Le projet s’intitule « Du réel à la scène, les pratiques théâtrales en contexte de conflit. Faire du théâtre en Palestine, en Irak et en Syrie à la période contemporaine » et examinera les adaptations et reconfigurations des pratiques théâtrales dans des contextes contraints, et les effets de ces contraintes sur les dramaturgies, par ses aspects textuel, scénique et performatif.
Dans le domaine de l’épigraphie arabe et islamique (F. Imbert), des campagnes de prospection sont prévues dès l’année 2023 dans le cadre du projet franco-saoudien Al-Ula Epigraphic project autour des villes de Tabūk et d’Al-Ulā. Un autre projet de terrain est en préparation et émane de l’IFAO (Le Caire). Il concerne l’étude, le classement et la création d’une base de données sur les stèles funéraires arabes d’Assouan en Égypte. Ces projets seront l’occasion d’y investir les compétences des post-doctorants aixois et spécialistes d’épigraphie islamique formés notamment à l’IREMAM.
Les travaux en épigraphie et en graffitologie appliquée au domaine arabe et musulman, depuis plus d’une vingtaine d’années, sont loin d’être achevés. Nos axes scientifiques privilégiés demeurent :
- Le Coran des pierres : de nombreuses inscriptions mentionnant des extraits coraniques anciens (VIIe - VIIIe s.) ont été récemment découvertes demandant une mise à jour de la base de données et analyse afin d’étudier leur taux de conformité avec le corpus coranique traditionnel.
- La question de la figure prophétique dans les graffiti anciens. Pour les mêmes périodes, nous continuons à étudier les graffiti mentionnant le nom du prophète Muhammad, afin de distinguer diverses phases en rapport avec l’emploi des termes de rasūl, ʿabd et nabī (envoyé, prophète, serviteur) dans le but de clarifier les conditions de son « apparition » historique dans les écrits lapidaires.
- Poursuite de la publication et de l’analyse de divers corpus d’inscriptions anciennes.
Est prévue aussi la rédaction d’un ouvrage spécifiquement dédié à l’épigraphie arabe et à la graffitologie islamique des premiers siècles de l’hégire, abordant la paléographie et l’ornementation des caractères, le décor, la datation et thématiquement, le contenu des milliers de graffiti récemment découverts au Proche-Orient et en Péninsule arabique.
Le programme IRN MIRACLE se poursuivra, autour de la question de l’ex-voto et du votif dans ses dimensions historiques, internationales et interdisciplinaires, programme coordonné avec plusieurs chercheurs du CEMCA (Mexique), de l’Inalco, du Césor et d’ArScAn. En octobre 2023, le programme est invité par la Maison franco-japonaise de Tokyo.
Enfin, le travail sur la tradition linguistique arabe et la falsafa se poursuit en vue d’une publication.
Les recherches en linguistique descriptive et typologique se poursuivront particulièrement à propos des évolutions syntaxiques et lexicologiques récentes, appliquées à l’arabe, à la didactique de l’arabe et au persan. L’un des buts est de construire des grammaires linguistiques des langues enseignées qui prennent en compte ces évolutions afin de combler le fossé entre les descriptions canoniques et normatives et la réalité des usages écrits contemporains. Les travaux portent notamment sur l’évolution syntaxique de l’arabe contemporain écrit. Une autre dimension concerne la lecture critique des textes grammaticaux anciens dans une perspective d’histoire des représentations de la langue arabe et de la construction des savoirs relatifs à cette langue, pour établir l'histoire de la pensée grammaticale arabe aussi bien dans une perspective endogène (influences des sciences arabes connexes à la grammaire) et exogène (influences par ou sur d'autres traditions grammaticales). En persan, les travaux portent sur le contact des langues dans les régions périphériques comme le Tadjkistan. Un projet de traduction concernant la langue et la grammaire du persan contemporain est en cours.
Les recherches en dialectologie et sociolinguistique arabisante portent principalement sur le Maghreb (J. Guerrero, C. Miller). Elles s’intéressent notamment aux questions d’évolution et de contact (entre langues, entre dialectes et entre registres) en s’interrogeant sur l’interaction entre changements sociaux, évolution des pratiques (orales et écrites) et des représentations/idéologies langagières, que ce soit dans les pratiques quotidiennes, les médias ou les scènes culturelles et artistiques. Elles s’inscrivent dans un partenariat international avec le Lacnad (INALCO), le CESIC de Grenade, l’Université de Saragosse, et l’Institut d’Etudes Orientales de l’Université de Vienne. Ces recherches se réaliseront entre autres par des enquêtes de terrain pour obtenir des données linguistiques sur les différentes variétés d'arabe parlées en Algérie. Le but de ce projet est d'enrichir nos connaissances sur l'arabe algérien, variété actuellement sous-représentée dans les travaux de dialectologie arabe. Les recherches portent également sur l’établissement et la mise en ligne d’un dictionnaire contextuel d’arabe égyptien qui comporte actuellement 17 lettres et 15422 exemples (C. Audebert).
En linguistique historique, il s’agira de poursuivre l’analyse des productions maghrébines en moyen arabe, variété combinant des éléments de l'arabe dialectal et d'autres de la langue classique qui peut nous fournir des informations précieuses sur l'évolution diachronique de parlers arabes modernes. Jusqu'à présent ont été analysées plusieurs lettres d'un corpus épistolaire luso-marocain du XVIe siècle numérisé par les archives nationales de la Torre do Tombo (Lisbonne). Est envisagée aussi une participation à l'IRN ALL (Afroasitic Languages and Linguistics): Bridging the Red Sea Rift, au sein de laquelle est menée une recherche sur le contact interdialectal et le contact de langue à Berkane (Nord-est marocain). Par ailleurs, un travail se poursuit en vue d’une publication sur le thème suivant : « L’arabe, états et variétés ; textes médiévaux arabes sur l’histoire et la sociolinguistique de la langue ».
Dans le domaine de la didactique appliquée à la langue arabe contemporaine, la rédaction du second volume de la méthode l’Arabe dans tous ses états (1er volume : Ellipses, 2022) se poursuivra et portera sur la morphologie et la syntaxe de cette langue entre les niveaux B1 et C1 du CECRL.
L’axe « Études amazighes » porte sur un monde berbère marqué par la diversité et la multiplicité des dynamiques qui le traversent. Il s’intéressera aussi bien à l’analyse des faits linguistiques, culturels et sociaux qu’aux constructions de l’amazighité, à la fois en tant qu’objet de recherche et en tant qu’objet de revendications, constructions qui mobilisent des axes nouveaux (articulation avec le politique, le genre, appropriation/gestion des ressources, usages et impacts des nouveaux médias...).
L’articulation de ces dynamiques, et en particulier leurs impacts sur les langues, nécessite une approche pluridisciplinaire et dépassant les cadres régionaux et nationaux, approche qui s’appuie sur la présence à Aix-en-Provence de spécialistes divers du domaine berbère mais aussi sur un réseau de collaboration internationale. L’objectif principal au cours de la période contractuelle à venir sera de contribuer à la tâche stratégique de formation des nouvelles générations de berbérisants (grâce à des codirections) et de consolidation des études berbères à AMU et dans l’espace européen mais aussi méditerranéen par une mise en réseau incontournable.
Les activités du séminaire de recherche « Amazighs - Tamazight / Berbère(s) et des « Journées études berbères » (IREMAM et INALCO) seront maintenues. Ces journées seront ouvertes aux autres pôles des études berbères européens (Naples, Cadix…).
Par ailleurs cet axe œuvrera à consolider un réseau reliant les pôles berbérisants européens (AMU, INALCO, Naples, mais aussi EPHE, Cadix,…) et maghrébins en encourageant la mobilité pour les étudiants de Master et Doctorat et les enseignants-chercheurs et chercheurs entre ces différents pôles, et en initiant des projets scientifiques collaboratifs autour de l’IREMAM, dans le cadre de partenariats déjà en place (notamment le Diplôme en Partenariat international (DPI) de Master, spécialité « Études berbères », qui associe AMU, INALCO et Université L’Orientale de Naples) ou en cours d’élaboration : programme « Maghreb Amazigh » (séminaire de recherche inter-laboratoire (IREMAM – Telemme – Mesopolhis) soutenu par l’institut SoMuM ; école doctorale internationale (AMU-IRMC) en études amazighes soutenu par AMIDEX.
Au niveau éditorial, il verra l’achèvement de la publication de l’Encyclopédie berbère.
Concernant la mise en valeur des Archives Berbères, l’exploration, inventaire et exploitation de dossiers inédits du fonds Arsène Roux devra se poursuivre.
Enfin, au sein de l’IREMAM, il visera à une articulation plus forte entre études berbères et études maghrébines à travers des aspects linguistiques (contacts de langue) mais aussi sociaux et politiques (appropriation de l’amazighité par les sociétés maghrébines dans leur ensemble) ; il participera à l’axe transversal « Ecole et éducation » en questionnant l’institutionnalisation des langues berbères selon diverses modalités dans les États maghrébins.