Axes transversaux

Les 3 axes transversaux regroupent des thématiques convergentes entre membres des équipes et permettent la mutualisation des réflexions et des compétences. L'objectif de ces axes est de nourrir les échanges entre les équipes disciplinaires.

Dans le contexte de restructuration nationale des études en islamologie (IFI), l’IREMAM entend promouvoir en son sein les recherches sur l’islam dans un contexte de double ouverture. La première concerne le fait religieux lui-même : d’une approche islamologique par les textes à une étude historique et sociologique des pratiques et engagements dans la société, le laboratoire continuera à multiplier les approches garanties par la présence, en son sein, de toutes les disciplines concernées par le fait religieux. La seconde ouverture porte sur le pluralisme religieux des régions étudiées en son sein : l’islam sera saisi dans la variété de ses branches (sunnisme, chiisme) et dans ses relations avec les autres communautés confessionnelles (juives et chrétiennes principalement). Le fait religieux sera saisi au sein des dynamiques spirituelles mais aussi culturelles et politiques qui traversent la région. Trois groupes de travail animeront des recherches qui concernent tous les pôles du laboratoire.

Les grammaires de la prédication

Chercheurs impliqués : V. Geisser, F. Lorcerie, S. Mervin, N. Neveu, T. Pierret, N. Zouggar.

Les chercheurs de cet axe proposent d’envisager le fait religieux à travers la notion de prédication, entendue comme un dispositif mis en place afin de constituer ou consolider une communauté de croyants. Moteur du « faire croire », la prédication et les prédicateurs demeurent peu étudiés dans leurs dimensions connectées et évolutives. L’équipe proposera des hypothèses transversales, par une approche connectée et la mise en perspective de terrains du Moyen-Orient (Égypte, Palestine, Syrie, Liban, Irak, Jordanie, Israël) depuis la fin du XIXe siècle. Ceux-ci pourront être comparés avec la structuration des communautés musulmanes de nos jours en Europe, en particulier en France. En analysant la prédication à la lumière de son lexique, de sa cartographie et de ses modes, l’objectif est d’en proposer une grammaire commune au judaïsme, christianisme et à l’islam. Les travaux de cet axe se structureront autour d’un séminaire commun, qui appuiera la soumission d’un projet ANR porté par N. Neveu.

Pluralisme religieux et relations interconfessionnelles

Chercheurs impliqués : A. Chekroun, V. Geisser, F. LorcerieN. Neveu.

Il s’agit d’interroger la notion de communauté religieuse dans différents terrains : islam en France, Pluralité des groupes confessionnels dans les mondes arabo-musulmans, phénomènes missionnaires. Dans une perspective historique ou sociologique, les chercheurs entendent investir ce champ déjà travaillé des relations interconfessionnelles, en s’intéressant à la genèse des identités religieuses de part et d’autre de la Méditerranée dans une perspective d’histoire sociale. Partant de ces approches relationnelles, les travaux de cette équipe éclaireront l’enchevêtrement et la circulation de ces modes d’appartenance entre religions et espaces géographique. Une part croissante des travaux menés à l’IREMAM est consacrée à l’islam de France sans l’isoler des réflexions semblables sur le Maghreb et le Moyen-Orient.

Cette thématique bénéficiera de programmes de recherche déjà initiés lors du mandat précédent : l’ANR Shakk (programmée jusqu’en 2024) organisera un colloque sur la redéfinition des identités religieuses en Syrie depuis le début de la guerre en 2011, tandis qu’un séminaire « Islams et musulmans de France » se poursuivra.

L’islam des textes à la pratique : autour des élites religieuses

Chercheurs impliqués : K. Chachoua, M. Laakili, B. Marino, F. Le Houérou, O. Lizzini, N. Michel, N. Neveu, S. Mervin, A. Perrier, T. PierretN. Zouggar.
 
Cet axe entend rapprocher des recherches habituellement cloisonnées entre étude islamologique des textes et étude historique ou sociologique des pratiques musulmanes. Il propose de les réunir en se penchant sur la formation des élites religieuses en contexte musulman (jurisconsultes, savants, juges qui constituent le groupe des ‘ulamā’), leurs travaux et leur contexte intellectuel d’écriture ainsi que leur rôle prescripteur sur les sociétés. Les formes d’institutionnalisation historique du savoir religieux seront comparées aux recompositions contemporaines de ces acteurs face à la croissance des États et l’ouverture d’un espace public et médiatique. La fabrique du droit et des savoirs dérivés de la tradition, en contexte sunnite et chiite, sera mise en relation avec leurs applications historiques et contemporaines dans des domaines variés : exercice du culte, propriété foncière, dévolution des biens ou pratiques charitables.

Cet axe, plus exploratoire que les deux précédents, donnera lieu à l’organisation d’une journée d’études rassemblant tous les chercheurs du laboratoire avant l’organisation d’un séminaire autour d’une thématique plus resserrée. Il s’appuiera sur les travaux du séminaire « Islamologie et sciences sociales » organisé par Anne-Sophie Lamine, Sabrina Mervin et Nadjet Zouggar.

Participants IREMAM : K. Chachoua, V. Geisser, J. Honvault, R. Jacquemond, F. Le Houérou, S. Mervin, N. Nakhlé-Cerruti, C. Parizot.

Cet axe transversal envisage les questions méthodologiques et épistémologiques soulevées par l’utilisation de pratiques exploratoires au croisement de recherches en sciences humaines et sociales, du cinéma et de l’art. Cette réflexion a démarré à l’IREMAM, il y a plus d’une décennie, autour des pratiques documentaires et cinématographiques puis s’est élargie, à partir de 2016, pour évaluer les défis et les retombés heuristiques de l’intégration croissante du numérique dans la recherche ainsi que celle de certaines pratiques artistiques. Ses activités ont mobilisé non seulement chercheur.e.s, mais aussi des artistes affilié.e.s ou associé.e.s à l’IREMAM. Outre l’évaluation des retombées de ces pratiques dans la production de la connaissance, l’invention de nouveaux savoirs-faire, de nouvelles écritures et l’élargissement des modes de diffusion de nos recherches, il s’agit d’envisager également comment renégocier la place de la recherche et des chercheur.e.s dans nos sociétés contemporaines.

1. Recherche filmique et documentaire

Dans la continuité du programme lancé en 2007 par Fabienne Le Houérou (Filmer les Mondes Arabes et Musulmans) une partie de cet axe transversal poursuit une réflexion sur les cinématographies académiques. Des spécialistes de l’image et du son associent la réflexion à la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles. L’un des enjeux majeurs est de repenser la relation texte/image/son dans une approche « rhizomatique » inclusive qui a été explorée dans différents films ethnographiques libre d’accès sur la chaîne DailyMotion et YouTube Cultura Mundi. Depuis 2019, cette chaîne Cultura Mundi travaille également avec le pôle image son de la MMSH et avec la phonothèque de la MMSH sur la mise en ligne d’archives visuelles de chercheurs). Plusieurs films sont en préparation ou en projet : 
- H. Darroman projette de réaliser un documentaire autour des films de solidarité, en comparant différentes expériences militantes (palestiniennes, vietnamienne, etc) au cours de l’histoire contemporaine.
- V. Geisser et A. Nadjar préparent un film documentaire Marseille. Phocée contre fossés. (26’) Ils proposent une histoire des Marseillaises et Marseillais confrontés à de multiples fractures sociales et territoriales qui luttent pour leur survie et entretiennent l’espoir de changer le système.
- F. Le Houérou réalise un film scientifique, Horizons froissés, qui interrogera 20 années de recherches sur les migrations forcées et les circulations volontaires : « Horizons froissés ».
- S. Mervin. A travers L'apothéose de Mariam, film portant sur la tombe de Mariam Abou Zahab, en Irak, l’auteur propose de saisir le processus de transformation du lieu (d'une simple dalle de ciment à un tombeau dans un grand bâtiment) pour comprendre celui de la construction de la sainteté de Mariam et, en même temps, les enjeux pour les acteurs locaux. Rencontres. Sabine Partouche organisera annuellement les Rendez-vous cinématographiques de l’IREMAM sous la forme d’une projection/débat à l’occasion de laquelle une cinémathèque de l’aire géographique des mondes arabes et musulmans sera invitée. Par ailleurs, un colloque prévu en 2024 interrogera à la fois l’évolution de la place des femmes dans les métiers du cinéma et dans les représentations de la femme à l’écran du monde arabe, particulièrement dans son rapport au politique, des indépendances aux récents soulèvements populaires.
- Femmes derrière/devant la caméra dans le monde arabe des indépendances aux soulèvements populaires du XXIe siècle. Coord. F. Le Houérou. Projet de colloque sur l’évolution de la place des femmes dans les métiers du cinéma et dans les représentations de la femme à l’écran du monde arabe, particulièrement dans son rapport au politique, des indépendances aux récents soulèvements populaires.

Projets éditoriaux
Science and Video. Créée en 2008 par Fabienne Le Houérou et Abdelmajid Arrif, cette revue met en ligne des films de chercheurs et d’étudiants. Son objectif est d’explorer les liens d’interdépendances et de conflits entre trois écritures : imagétique, sonore et textuelle. Elle explore des écritures multimédia en Sciences Humaines.
Parallèlement, Fabienne Le Houérou et K. Chachoua coordonnent un projet éditorial sur le travail imagétique des chercheurs en sciences humaines. L’un des ouvrages prévus (2024) portera sur Fanny Colonna.

2. Pratiques artistiques et dispositifs critiques

Dans le prolongement du programme de recherche antiAtlas des frontières, lancé en 2011, l’IREMAM a développé des expérimentations associant chercheur.e.s et artiste.s. L’enjeu est double. A travers ces dispositifs critiques, il s’agit non seulement d’éprouver de nouvelles formes d’enquête, de prises de paroles, d’écritures, de monstration et de communication de la recherche, mais également de réfléchir pratiquement à d’autres modes d’intervention et de mise en relation des chercheur.e.s avec la société. Ces questions sont d’autant plus significatives dans nos mondes post-médias et post-numériques où la position des universitaires est de plus en plus marginalisée.
 
Au cours de ces cinq prochaines années, nous proposons de poursuivre la diversification des expérimentations entre chercheur.e.s et artistes. Les explorations que nous avons menées depuis une dizaine d’années montrent effectivement que la confrontation avec des pratiques artistiques multiples permet de mettre en œuvre une épistémologie pratique autour des dispositifs cognitifs et sensoriels qui organisent nos rapports avec les mondes que nous tentons de comprendre.

Expérimentations :
- Cartographie alternative : Th. Borel, G. Terrasson, C. Parizot, I. Seri-Hersch, C. Vendryes sont impliqués dans un projet de cartographie alternative des espaces israélo-palestiniens à partir d’une réflexion autour de la visualisation de leurs données de terrain ou de leurs recherches en archives.
- Cirque : V. Berhault, V. Geisser, R. Jacquemond, C. Parizot explorent la conception de pièces avec des jongleurs, en collaboration avec le Centre international des arts en mouvement d’Aix-en-Provence, la Maison des Jonglages (La Courneuve) et le Pôle cirque de la Verrerie d’Alès.
- Théâtre : N. Bulbul, V. Guéno, N. Nakhlé-Cerruti et S. Mervin étudient et explorent différents modes de mobilisation des archives et des médias dans la production du spectacle vivant.
- Son : en collaboration avec le laboratoire Locus Sonus (Ecole supérieure d’art d’Aix-en-Provence) et dans le cadre du programme cadre CNRS/ministère de la Culture et de la Communication, C. Parizot travaille avec Peter Sinclair.

Projets éditoriaux :
- antiAtlas-Journal : l’IREMAM s’est engagé dans l’exploration des formats éditoriaux originaux offerts par le numérique. Conçu et dirigé en collaboration avec une artiste et designer (Thierry Fournier), l’antiAtlas Journal expérimente d’autres modes d’articulation entre texte et média, et ainsi d’autres formats d’écriture et de diffusion de la recherche.

Programmes de recherche :
- antiAtlas des frontières (coord. J. Cristofol, Th. Fournier, A. Guillo, C. Parizot).
- Recherche par l’écoute : expérimentations artistiques et dispositifs critiques. (Coord. C. Parizot, P. Sinclair)
- Recherche, art et sciences participatives, coord. P. Cesaro et C. Parizot. En partenariat avec PRISM et la Fondation Amidex.

Participants IREMAM : M. Assam, M. Bakhouch, J. Garric, V. Guéno, J. Honvault, M. Laakili, F. Lorcerie, C. Mussard, F. Siino.

Il s’agit ici de poursuivre, sous un nouvel intitulé, les travaux engagés dans l’axe transversal de recherche « Politiques éducatives, pratiques pédagogiques et interactions sociales » créé en 2016, en y intégrant de nouvelles thématiques et de nouveaux chercheurs.

Cet axe invite à développer de nouvelles thématiques relatives aux modalités de transmission des savoirs scolaires et de formation à la citoyenneté en interrogeant les rapports entre l’école et l’État ou les autorités dont elle relève. L’espace considéré est celui de l’espace arabo- musulman, mais aussi celui des lieux où les populations originaires de cet espace vivent et constituent des minorités, où sont particulièrement interrogés les défis éducatifs que constituent la diversité ethno-raciale, culturelle et religieuse.

Les rapports de l’école à l’État, thématique déjà développée depuis 2021, seront plus encore travaillés durant les années à venir, à travers l’analyse des politiques éducatives, des pratiques pédagogiques et éducatives, des approches didactiques, des langues enseignées et d’enseignement, des contenus prescrits, enseignés et réellement reçus, tout comme l’analyse des lieux, des conditions et des acteurs des processus de transmission, d’apprentissage, d’éducation et de formation sont appréhendés dans les spécificités historiques, sociologiques et géopolitiques de cet espace ou dans les circulations qui le traversent.

Un séminaire de recherche mensuel continuera de regrouper les travaux relatifs à l’éducation portés par des chercheurs issus des différentes équipes de l’IREMAM (Sciences sociales du contemporain, Histoire et islamologie, Langues, littérature et linguistique) ainsi que de laboratoires extérieurs. Les questions de recherche abordées se nourriront des apports d’une historiographie récente, mais aussi des éventuels besoins de la communauté enseignante de l’académie d’Aix-Marseille.

Cet axe continuera de porter et de soutenir également des actions de sensibilisation à la recherche sur les mondes arabes et musulmans à destination des enseignants, du primaire à l’université : cordée de la réussite Cinésciences menée jusqu’en 2023-2024 auprès de lycées et collèges de Marseille et de la région PACA ; diffusion de l’exposition « Enfances au Yémen de 1950 à nos jours » et partenariat avec l’INSPE d’Avignon pour l’élaboration d’un carnet pédagogique ; élaboration d’une didactique de l’enseignement du berbère à AMU.

Le carnet de recherche de l’axe sera complété afin de permettre la visualisation des activités et manifestations scientifiques portées par les chercheur·e·s.

Le projet « Poésie et savoirs dans le monde arabo-berbère », coordonné par Mohamed Bakhouch avec la participation de M. Adel, Y. Boujeddaine, M. Hraga, A. Khalifa, M. Laakili et A. Oulddali. Ce projet se fixe comme premier objectif la constitution d’une anthologie des savoirs versifiés. En partant de ces compositions exemptes de toute poéticité, il s’agit de montrer comment le processus de mémorisation/oralisation et par la suite celui de la transmission fait le savoir scripturaire en savoir oral. Une oralité seconde qui participe à son tour à sa diffusion.